
Par Howard Druckman
Après les Grammy Awards 2017, où « Hotline Bling » a remporté le trophée de la meilleure performance rap/chantée et celui de la meilleure chanson rap, Drake a déclaré, sur les ondes de la radio OVO Sound d’Apple Music : « On me qualifie d’artiste noir, comme hier soir [aux Grammys], je suis un artiste noir… Apparemment, je suis un rappeur, même si “Hotline Bling” n’est pas une chanson rap ». Il se retrouve catalogué comme artiste rap même si « Hotline Bling » est réellement une chanson pop.
À tout dire, Drake a des goûts musicaux remarquablement éclectiques. Sur sa nouvelle « playlist » (qui est en fait un album) intitulée More Life, on peut entendre des échantillonnages de Lionel Ritchie (« All Night Long »), Earth Wind & Fire (« Devotion »), du DJ sud-africain Black Coffee (« Superman »), de l’artiste australien Hiatus Kaiyote (« Building a Ladder ») et même un petit extrait du thème musical du jeu vidéo Sonic the Hedgehog. Il y explore des genres musicaux tels que l’afrobeat, le grime, la musique arabe en plus de poursuivre son exploration des styles musicaux caribéens comme le dancehall, le trap et d’autres qu’il nous a présentés (ainsi qu’au monde entier) sur VIEWS.
Drake est un avide auditeur, et porte-étendard, de tous les styles musicaux. Prenez l’exemple de son travail de curateur pour l’accompagnement musical d’une exposition d’œuvres d’artistes afro-américains des 70 dernières années présentée par la galerie d’art Sotheby’s S|2 : on y retrouvait entre autres la pièce « 32-20 Blues » du pionnier du genre, Robert Johnson. Ce qui est encore plus étonnant, c’est que Drake affirme qu’il écoute cette chanson avant chacun de ses spectacles, parce que « c’est comme ça que je me prépare. »
Un autre bon exemple de cet éclectisme est l’échantillonnage qui est au cœur de « Hotline Bling », tiré d’une pièce de Timmy Thomas — « Why Can’t We Live Together? », le seul succès de cet artiste — parue en 1972, une chanson au tempo plutôt lent qui plaide pour la paix dans le monde. Drake serait tombé amoureux de cette chanson après que son bras droit et réalisateur Noah « 40 » Shebib lui ait fait découvrir. Dans une entrevue accordée à Nardwuar, qui lui a fait entendre un message de remerciement de Thomas, Drake a répondu : « je veux le remercier d’avoir fait cette incroyable musique du temps qu’il faisait de la musique. Et surtout d’avoir créé quelque chose d’intemporel, parce que c’est très difficile, et pas juste quelque chose qui vous touche encore des années plus tard, mais quelque chose qui est tellement bon qu’on peut en prendre un petit bout et faire quelque chose d’autre avec. Ça prend une création réellement exceptionnelle. »
Mais l’un des exemples les plus remarquables entre tous fut cette brève fuite en ligne d’une pièce où Drake chantait un couplet de la pièce « These Days » une ballade aussi triste que magnifique que l’auteur-compositeur-interprète Jackson Browne avait écrite pour la chanteuse de Velvet Underground, Nico, en 1967. Drake a fait équipe avec Babeo Baggins de Barf Troop afin de l’enregistrer pour un EP de reprises. « C’est bien simple, “These Days” est ma chanson préférée », avait alors déclaré Baggins au magazine Fader. « Je l’ai partagée avec mon ami qui ne l’avait jamais entendue avant. Il l’a beaucoup aimée, il a dit que c’était vraiment une grande chanson. » La version non autorisée de Drake a depuis belle lurette été retirée d’Internet et Baggins ne l’a pas publiée, mais vous pourrez tout de même entendre la version de 1973 par Nico ici.
Peut-être que c’est parce qu’il écoutait les disques dans la collection de son père, lorsqu’il était plus jeune. Peut-être qu’il a tout simplement l’esprit très ouvert, musicalement. Peut-être qu’il se lasse facilement et qu’il a constamment besoin d’explorer. Peut-être un peu de tout ça. Mais peu importe la raison, Drake est en contact avec toutes sortes de musique, et c’est pour cette raison que sa propre musique est si solide.